Semaine 7 – Se libérer du poids du regard des autres

Il y a des regards qui nous marquent durablement : un froncement de sourcil, un silence pesant, une remarque apparemment anodine, mais qui nous a fait l’effet d’une gifle…
À force de répétition, certains de ces regards finissent par s’imprimer en nous. Ils déforment subtilement la manière dont nous nous percevons, et surtout, ils laissent une empreinte douloureuse.

Même lorsque nous savons, intellectuellement, que nous avons le droit d’être nous-mêmes, il subsiste souvent une peur plus profonde : celle de se heurter à nouveau à ce regard blessant — moqueur, critique, humiliant, rejetant…

Montrer qui l’on est aujourd’hui, c’est alors prendre le risque de retrouver cette douleur. Alors, instinctivement, on préfère l’éviter. On se replie, on s’efface un peu, comme pour se protéger.

Ces regards ne prennent pas toujours la forme d’une critique frontale. Parfois, ils sont silencieux. Et c’est précisément ce silence qui fait mal.

C’est ce que j’ai vécu lorsque j’étais enfant, j'étais alors à l’école primaire. J’avais un rêve très fort : je voulais devenir écrivaine.
Je lisais énormément, et vers l’âge de dix ou onze ans, j’ai commencé à écrire un roman inspiré de la série du Club des cinq, que j’adorais à l’époque. Ce projet comptait énormément pour moi. J’y mettais toute mon énergie, tout mon enthousiasme d’enfant.

Je ne me souviens pas d’une parole blessante. Mais il y avait ce regard moqueur, ou peut-être juste un peu dédaigneux, de ma mère. Et surtout, il y avait ce silence. Ce désintérêt profond qui répondait à mon enthousiasme. Cette absence de partage, de curiosité, de chaleur.

Mes parents avaient d’autres projets pour moi. Ils voulaient que je fasse des études scientifiques, que je devienne ingénieure, que je gagne bien ma vie. Pour eux, les choses sérieuses, c’était ça.
L’écriture, c’était une lubie. Un passe-temps inutile. Et même si rien n’a été dit clairement, j’ai senti que ce que je créais et ce qui m'animait n’avait aucune valeur à leurs yeux.

Alors j’ai fini par penser que mon roman était nul. Dans un mélange de rage et de tristesse, je l’ai jeté à la poubelle. Et je n’ai jamais réécrit.

Ce rêve a été enterré pendant des années.

Il m’a fallu plus de trois décennies pour revenir vers la petite fille que j'étais et ses rêves. Pour me donner enfin le droit et le temps de me consacrer à l'écriture d'un livre et à sa publication.
Ce n’était pas un roman pour enfants. Mais c’était, malgré tout, un livre destiné aux enfants blessés que nous portons encore en nous. Ceux qui cherchent à retrouver leur lumière.

Il y a eu plusieurs autres pas que j'ai fait vers moi-même avant, puis après. Mais celui-ci a sans doute été le plus important, même s'il y en a encore beaucoup d'autres à faire pour me rapprocher encore davantage de la petite fille que j'étais qui m'attend toujours...

C'est un long chemin de revenir vers soi, sans doute sans fin. Mais ce sont tous ces pas que l'on pose les uns après après les autres qui nous ramènent vers plus de joie, de bonheur, de légèreté, d'amour de la vie... Alors cette semaine, nous allons essayer de nous relier à notre enfant intérieur(e) et écouter quelles parts de lui(d'elle) ont été étouffées ou bloquées par le regard des autres.

Et vous, quand vous vous êtes empêché(e) de faire quelque chose par peur du regard des autres ? Pouvez-vous en retrouver la trace ?
Un geste que vous avez retenu, un mot que vous n'avez pas osé dire, un vêtement que vous n'avez pas osé porter, un rêve que vous avez peut-être vous aussi rangé dans un tiroir...